Si l'on ne parle que français lors d'une manifestation viticole dans la région germanophone de Zurich, il y a fort à parier que c'est Bordeaux qui est en visite. En effet, seuls les représentants de la "région viticole la plus célèbre du monde" peuvent se permettre - là où se trouve beaucoup d'argent - de parler leur propre langue, voire de passer à l'anglais des affaires. On entend alors quelque chose comme ceci: "70% Merlot, 10% Cabernet Sauvignon, 10% Cabernet Franc, 10% Petit Verdot" - jusque-là, c'est compréhensible dans toutes les langues - et ensuite, presque comme une litanie: "...The palate is medium-bodied with mulberry and dark plum fruit intermingling with Chinese tea and a touch of cloves..."Mais maintenant, il faut absolument prendre un air sérieux, ne pas contredire (ni même déceler de nouveaux arômes); il est bien mieux de gratter le meilleur français d'école, de regarder profondément dans le verre et d'acquiescer religieusement, sinon on sera submergé par un flot de "Français". C'est ainsi que l'on passe de table en table, de château en château. Un rituel, en somme...