Impressions luxembourgeoises

Les vins mousseux

Avec une part de 20% de la production totale, les vins effervescents font partie intégrante de l'offre de la majorité des viticulteurs luxembourgeois et les plus grands, comme Vinsmoselle, Gales et Bernard-Massard, doivent une part considérable de leur chiffre d'affaires à la vente de bulles pétillantes. Contrairement aux vins tranquilles, l'exportation joue même un rôle ici, et Bernard-Massard, par exemple, commercialise une partie non négligeable de sa production annuelle de mousseux d'environ 3.500.000 bouteilles, pas toutes d'origine luxembourgeoise, il est vrai, par le biais de filiales propres à l'entreprise en Belgique, en Allemagne et en France. Les meilleurs vins originaires du Grand-Duché peuvent se targuer de l'appellation "Crémant de Luxembourg", introduite en 1991, mais doivent pour cela répondre à des critères de qualité stricts. Il s'agit bien entendu de vendanges manuelles, d'une limitation des rendements, d'une fermentation en bouteille et d'un vieillissement minimum de 9 mois sur lies, sans compter qu'ils doivent également passer un examen sensoriel. La "station spatiale" d'Ellange, mise en service en 2003 par les Caves Gales, montre qu'il est possible de gagner de l'argent dans ce domaine malgré l'excellent rapport qualité-prix. Il s'agit d'une technologie de pointe pour les vins effervescents, qui est encore loin d'atteindre sa pleine capacité avec la production actuelle d'un million de bouteilles par an. Le Rivaner et l'Elbling sont les principaux cépages utilisés pour les vins mousseux luxembourgeois, mais le Pinot Blanc et le Riesling sont également traités, notamment pour les qualités supérieures.

Les cépages

Dans l'ensemble, le Rivaner est le cépage le plus répandu et s'est débarrassé ici depuis longtemps, même pour le vin tranquille, de la réputation qui lui colle à la peau ailleurs sous l'alter ego du Müller-Thurgau. Cela est probablement dû au fait qu'il ne pousse pratiquement que sur les coteaux, car la viticulture en plaine est quasiment inexistante au Luxembourg. De plus, il est généralement vinifié de manière relativement sèche et convient donc bien pour accompagner les repas. Le pinot blanc joue également un rôle quantitatif, tandis que pour les exigences plus élevées, les meilleurs vignobles sont souvent plantés de riesling et de pinot gris. Les "exotiques" Elbling, Chardonnay, Gewürztraminer et Pinot Noir nécessitent en outre un doigté particulier pour ne pas apparaître en queue de peloton dans la compétition interrégionale. Jusqu'à présent, les producteurs locaux n'ont pas fait assez de bruit autour de l'auxerrois, qui se présente ici souvent à un niveau étonnant et qui a tout à fait le potentiel pour aider l'industrie viticole luxembourgeoise à percer sur le plan international en tant que figure de proue.

Les règles

Que l'on soit un véritable amateur de vin ou un snob, il n'est pas aussi facile au Luxembourg qu'ailleurs d'en savoir plus sur la hiérarchie des producteurs ou des terroirs. Il n'existe pas de classement des vins comme Gault-Millau, Eichelmann ou Wein-Plus. La classification établie chaque année par l'Institut national Viti-Vinicole ne se base pas sur le terroir, mais sur le jugement organoleptique d'une commission d'examen. Celle-ci est composée de sept membres issus non seulement des producteurs, mais aussi de la protection des consommateurs, de la restauration et des autorités publiques. On s'efforce ainsi de garantir la plus grande objectivité possible lors de l'évaluation. En fonction du nombre de points obtenus, les vins sélectionnés pour la "Marque Nationale" peuvent se voir attribuer le label Appellation Controlée ou, en cas de classement croissant, les mentions supplémentaires "Vin classé" ou même "Premier cru". Les dégustateurs font fondre les meilleurs sur la langue et peuvent attribuer la plus haute distinction, le "Grand Premier Cru", s'ils sont appréciés à leur juste valeur. Ce qui n'atteint pas le nombre de points minimum tombe dans la catégorie "vin de table", qui s'applique également aux vins des viticulteurs qui ne demandent même pas de classification officielle.

La plus haute distinction: Grand Premier Cru

Elbling, cuvées et crémants ne peuvent pas se qualifier au-delà de la "Marque Nationale - Appellation Controlée", tandis que pour le Rivaner, la limite supérieure est le "Vin classé". Les vins doux sont également pris en compte par la loi viticole nationale, la mention "Vendange Tardive" couvrant toute la gamme entre la vendange tardive douce et la sélection de grains secs. Pour les vins issus de la vendange de raisins gelés sur pied, il existe la mention "Vin de Glace", qui correspond davantage à la méthode qu'aux exigences du Eiswein allemand. A cela s'ajoute une particularité luxembourgeoise, le "Vin de Paille", qui consiste à réduire des raisins mûrs ou trop mûrs en raisins secs avant la fermentation. Charles Decker de Remerchen, qui propose des raretés telles que le vin de paille de pinot blanc, de gewurztraminer et d'auxerrois, n'est pas effrayé par les efforts disproportionnés que demande cette méthode.

Ambitions et terroir

Certains producteurs sentent que leurs ambitions ne sont pas suffisamment servies par la seule classification Marque National, et c'est ainsi qu'au Luxembourg sept domaines viticoles renommés se sont réunis pour commercialiser une partie de leur récolte sous la bannière "Domaine et Tradition". Avec Aly Duhr, Clos Mon Vieux Moulin, Sunnen-Hoffmann et Mathis Bastian, quatre véritables entreprises familiales sont représentées, mais l'appartenance du Domaine Gales et de l'entreprise Bernard-Massard, cette dernière n'étant toutefois représentée que par ses joyaux que sont le Clos des Rochers et le Château de Schengen du Domaine Thill, témoigne que la finesse n'est pas toujours synonyme de petitesse. Seuls les vins monocépages issus des cépages riesling, gewurztraminer, pinot gris, pinot blanc et auxerrois peuvent se qualifier pour l'étiquette du "Domaine et Tradition" et doivent se soumettre à des limitations de rendement strictes et à une dégustation critique à l'aveugle de tous les membres, sur le modèle du grand cru alsacien. Pour ce supplément de qualité et de typicité, le client connaisseur est alors prêt à payer un peu plus cher. Pour le reste, les "sept glorieux" produisent la majorité de leurs vins sous leur propre drapeau et peuvent, comme tous les autres viticulteurs, utiliser des appellations de lieux-dits s'ils veulent indiquer l'origine d'un vignoble particulier. Comme dans la plupart des autres régions d'Europe, il existe au Luxembourg des vignobles qui bénéficient d'une réputation particulière. En ce qui concerne les sols, la partie nord de la Route des Vins est principalement constituée de calcaire conchylien, tandis que la partie sud est dominée par les marnes du Keuper. Par conséquent, les vins du canton de Grevenmacher sont souvent un peu plus corsés et plus souples, tandis que les vins du canton de Remich se distinguent par leur race et leur élégance.

La cuisine

Comme nous l'avons déjà mentionné, la grande majorité des vins locaux sont vinifiés en sec, ce qui fait qu'ils peuvent très bien être bus pendant le repas. Je ne pense pas que l'on blesse trop la fierté des habitants du pays en disant qu'il n'existe pas de cuisine luxembourgeoise en tant que telle, mais on sait parfaitement intégrer les influences culinaires des grands pays voisins. Plusieurs restaurants étoilés au Michelin en témoignent, non seulement dans la capitale mais aussi à la campagne. Les vignobles de la Moselle ne sont qu'à quelques kilomètres de la petite ville de Frisange, où la formidable Léa Linster dirige la cuisine du restaurant qui porte son nom. Cette Luxembourgeoise d'origine a été la première et jusqu'à présent la seule femme à remporter le "Bocuse d'Or" en 1989, l'une des plus hautes distinctions dans le monde de l'art culinaire. C'est dans sa "Cuisinière" qu'un petit groupe de journalistes spécialisés dans le vin, venus de Grande-Bretagne, de Belgique, de Norvège et d'Allemagne, a pu apprendre - voire, dans certains cas, se convertir - que le vin local peut parfaitement former un duo harmonieux avec les plats les plus raffinés. Les grands, les moyens et les petits producteurs ont été mis à contribution de manière très équitable, tous n'ayant engagé que leurs meilleurs produits. L'Auxerrois a confirmé sa réputation de vin secret pour accompagner le pressé de lapin au foie gras, le Rivaner a pu se mesurer à un plat de légumes, le Pinot Blanc s'est révélé être un compagnon compétent pour le risotto aux cuisses de grenouilles. Avec la salade de homard, la race d'un Riesling et l'arôme d'un Pinot Gris se sont disputés nos faveurs. Le caviar sur mousse d'œufs était plus difficile pour les Chardonnay et Auxerrois en concurrence, mais deux Rieslings traditionnels se sont montrés à la hauteur du confit de saumon avec purée de petits pois. Avec les tranches de rôti de gibier, c'est peut-être la plus grande audace, mais ici, le Pinot Noir Barrique 2003 d'Aly Duhr a fait une véritable roue de paon! En revanche, l'expérience avec le soufflé au fromage de chèvre luxembourgeois et les Pinot Gris et Auxerrois Vendange Tardive servis en accompagnement n'a pas été aussi réussie, mais cela a été vite oublié avec le feu d'artifice final de crème glacée à la vanille et à l'ananas, de vin de paille Gewurztraminer et de vin de glace Riesling.

Le site

Après un marathon de trois jours avec de nombreuses visites de domaines, des discussions animées et près de 300 vins dégustés, on peut déjà se faire une bonne idée de la scène viticole luxembourgeoise. Ce qui saute aux yeux, c'est l'étonnant rapport qualité-prix. C'est surtout avec le Goliath des producteurs locaux que l'on remarque que rien n'est négligé pour être compétitif dans la concurrence européenne. Le Domaine de Vinsmoselle, avec ses grandes caves à la pointe de la technologie, impose aux vignerons fournisseurs des exigences de qualité strictes et détermine lui-même les dates de vendange afin de s'assurer de la meilleure qualité possible du raisin. Cela lui permet non seulement de se maintenir facilement dans le concert des vins bon marché, mais aussi de briller avec des sélections spéciales, comme le prouve l'obtention de médailles d'or au Mundus Vini 2007 pour deux Pinot Gris, un vin de terroir unique et une "Vendange Tardive". Ce succès a également été accordé à un "Domaine et Tradition" 2006 Pinot Gris de la moyenne entreprise Caves Galen. Alors que les plus grands de la branche peuvent davantage faire valoir leur force dans les vins de marque, on trouve parfois dans les petits domaines familiaux des spécialités étonnantes qui ne peuvent être produites qu'en édition limitée. Dans le domaine des vins de dessert, Charles Decker, déjà mentionné plus haut, se distingue.

Vins luxembourgeois mûrs

À Ahn, les deux branches de la famille Duhr ont démontré lors d'une dégustation commune que la longévité n'est pas un problème pour les vins luxembourgeois, à condition de viser la qualité. C'est également ce qu'a démontré l'équipe père-fille du domaine Mathis Bastian à Remich, où les vendanges manuelles en plusieurs passages sont une condition sine qua non pour une qualité de pointe. Le domaine boutique Alice Hartmann à Wormeldange, où le riesling, le chardonnay et le pinot noir sont toujours rapidement vendus, a également une réputation de producteur de pointe. La devise "Petit mais raffiné" s'applique également à deux exploitations familiales du sud de Wintrange, où Sunnen-Hoffmann à Hommelbierg et Schuhmacher-Knepper à Felsberg possèdent des propriétés dans les meilleurs vignobles. La philosophie d'entreprise de deux entreprises aussi différentes que le domaine familial traditionnel A. Gloden & Fils à Wellenstein et l'entreprise relativement nouvelle de Cep d'Or avec des vignobles à Stadtbredimus, est de ne pas perdre de vue ce que le client peut s'offrir malgré la recherche de la qualité.

Pour conclure, il ne reste plus qu'à dire, surtout pour les amateurs de vin allemands: le Luxembourg ne vaut pas seulement le détour pour le prix de l'essence!